“ Crée une peinture de style Renaissance montrant un rover sur Mars. Utilise des techniques comme le clair-obscur et des couleurs chaudes…”

C’est aujourd’hui le genre de choses que l’on peut demander à ChatGPT, ou à d’autres IA génératives et en quelques secondes, elles vous créeront des images terriblement surprenantes !

Fait particulier, l’esthétique dépasse largement ce que l’humain faisait auparavant, même avec un outil informatique perfectionné…

Vers une nouvelle forme d’esthétisme ?

Si vous parcourez régulièrement des articles sur internet, il ne vous aura probablement pas échappé que de plus en plus, les illustrations (dessins) reviennent à la mode alors que depuis les années 70, la photographie avait pris le relais sur tous les secteurs illustratifs. Bien entendu, l’illustration continuait de faire son petit bonhomme de chemin (confrère, The New Yorker), mais elle n’était plus la règle, comme ce fut d’ailleurs le cas dès l’apparition de l’imprimerie – au bas mot – et l’on pourrait remonter bien au delà car les peintures préhistoriques rupestres étaient elles aussi des illustrations du mode de vie de l’époque…

Cependant, les illustrations que l’on peut voir de plus en plus, pour animer des articles, sont très différentes de celles que l’on a connues par le passé. Le regain pour le dessin reprend le dessus sur la photographie car il est bien moins cher aujourd’hui de taper quelques mots sur Midjourney ou sur ChatGT, que de faire appel à un professionnel de la photographie ou du dessin. Mais ce qui est le plus remarquable avec ce nouveau type d’illustration, c’est que les images qu’elles montrent sont infiniment plus complexes dans les détails par rapport à ce qu’un être humain pourrait réaliser …

Le temps…

Aujourd’hui, en quelques secondes, vous pouvez générer une image extrêmement complexe, dotée de nombreux éléments. Jusqu’ici, il aurait fallu plusieurs jours, voire des semaines à un artiste (ou illustrateur) professionnel pour la réaliser, et c’est là toute la magie, tout simplement avec quelques mots !

Qui dit rapidité dit aussi, gain de productivité :

Nous allons donc assister dans les prochaines années à un phénomène similaire à ce que nos ancêtres ont vécu à partir des années 1870 (la généralisation de la photographie). Cependant, cela n’a rien à voir avec la généralisation de l’informatique personnelle des années 80, qui a vu naître des outils qui permettent de développer des images plus rapidement que ce que les publicitaires et les graphistes pouvaient faire auparavant. Bien au contraire nous allons vivre une nouvelle forme d’esthétisme similaire à celle que la photographie nous a amené autrefois. En ce sens, la généralisation de l’informatique personnelle s’est appropriée l’hégémonie de la photographie pour l’améliorer et la transformer beaucoup plus rapidement. Le créateur restait cependant humain et obéissait, ce faisant, à des lois humaines. Ce à quoi nous avons à faire aujourd’hui est d’un tout autre ordre :

Il s’agit ici de concentrer tout le savoir humain – une sorte d’universalité – sur une seule image et ce sur une simple demande écrite. Nous sommes donc face à une révolution !

Nous allons devoir opérer exactement de la même manière que le peintre paysagiste pouvait réaliser son œuvre en quelques minutes à la fin du XIX°siècle à la place d’y passer plusieurs dizaines d’heures (en réalité en ce qui concerne la photographie, un peu plus car, vers vers 1860, les prises de vue prenaient au moins une heure).

Au-delà de l’image parfaite ?

A chaque moment de l‘histoire où les gains de productivité ont été multipliés par des machines, l’humanité a assisté à des révolutions et nous sommes en ce moment en train d’y assister. Le tout est de savoir quelle forme, la révolution qui est en cours, va prendre ?

Tout d’abord les critères de perfection visuelle sont très largement augmentés ! 

Mais dans un contexte dans lequel les systèmes de prise de photographie dans les smartphones, caméras ou dans les casques de réalité augmentée ne cessent d’être de plus en plus performant – jusqu’à même dépasser la vue humaine – cela n’a pas vraiment grand chose d’étonnant.  

Deuxièmement, comme nous l’avons vu plus haut, l’image peut être enrichie instantanément avec le savoir, l’anticipation et le vécu universel. Il ne s’agit donc plus de se déplacer pour aller photographier ou dessiner l’élément dont on a besoin pour l’intégrer dans une composition, mais de taper un texte. En bref tout est à portée de main (ou et surtout de la capacité de la connaissance, car sans cet élément, les recherches peuvent être très largement compromises) ce qui génère une capacité de production équivalente à ce qu’il est possible de faire extrêmement vite. 

Aller au-delà de l’image parfaite, c’est avant tout rester humain et créer. Peu importe l’outil que l’on va utiliser et surtout en se posant les questions adéquates pour obtenir les bonnes réponses, exactement comme les peintres d’autrefois se sont demandé ce qu’ils allaient faire désormais…

Soyons clair, le constat est que la production artistique n’a jamais été plus prolifique qu’au XX°siècle à un point tel qu’en 2024, les artistes sont obligés de remettre leurs propres productions en question. Tout simplement parce que le monde est saturé par des objets (quels qu’ils soient). 

Nous n’avons encore aucune idée du type d’esthétique qui va s’imposer dans l’avenir (ce sera probablement des images ultra complexes et très sophistiquées) mais ce que nous savons, c’est qu’en termes de quantité, cette nouvelle esthétique sera abondante puisqu’elle pourra être générée par plusieurs milliards de personnes – exactement comme la photographie aujourd’hui. 

Ce qui va en fait renforcer l’artiste sur son pied d’escale, c’est avant tout l’imperfection humaine.  

L’histoire se répète donc …

Sébastien Colson 

C’était bien ?

Bon…

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