C’est fou ce que l’on peut entendre parler de devises numériques et de crypto-monnaies de nos jours…
Elon Musk a joué sans subtilité – comme à son habitude et ce n’est pas du tout une critique – avec le bitcoin ces derniers mois. L’administration salvadorienne a décidé de prendre comme monnaie officielle ce même Bitcoin. Amazon s’intéresse de près au même phénomène et aujourd’hui c’est le gouvernement indien qui donne le ton avec l’annonce officielle – après la Chine et l’UE – du développement de sa propre devise nationale numérique.
C’est bien beau tout ça, mais si chaque pays possède sa propre devise numérique (ou se plie à des devises numériques extérieures), qu’est ce que cela peut changer pour nous ?
On prend les mêmes et on recommence ?
On peut en effet se demander quelle serait véritablement l’utilité – soyons égocentriques – d’un euro numérique, puisque de toutes les façons, nous avons aujourd’hui des moyens de payer facilement nos achats avec les transactions bancaires ou extra bancaires comme avec Paypal par exemple ?
Comme nous ne sommes pas ici dans un cours de finance, je vais passer tous les détails techniques (auxquels je ne saurais pas vous répondre de toute façon), donc nous allons entrer directement dans le vif du sujet :
Une devise numérique nationale, c’est un moyen de ramener des opérations de paiement détenues par de multiples organismes vers un procédé central et étatique. C’est-à-dire entièrement soumis au contrôle des banques nationales. Ces mêmes banques nationales qui émettent de l’argent numérique, exactement de la même manière qu’elles émettent de l’argent physique. Et de ce fait d’éviter une multiplication de possibilités de paiements alternatifs par rapport à l’émission de ces mêmes devises (ou bien entendu de devises alternatives). Nous allons y revenir, mais si vous avez raté l’épisode de l’annonce d’une monnaie numérique privée – qui pourrait devenir le futur dollar numérique américain – initiée par Facebook (Libra), voyez dans la nécessité de ces monnaies numériques nationales une solution unilatérale pour essayer de conserver le système monétaire officiel. Mais tout cela, c’est pour la version officieuse.
Voyons maintenant ce qu’il en est de la version officielle de l’UE :
“Un euro numérique combinerait l’efficacité d’un instrument de paiement numérique et la sécurité d’une monnaie de banque centrale. Il serait le bienvenu dans les situations où les espèces ne sont plus le moyen de paiement privilégié et il permettrait de ne pas dépendre d’instruments de paiement numériques émis et contrôlés en dehors de la zone euro, sources potentielles d’instabilité financière et de perte de souveraineté monétaire. Le respect de la vie privée serait une priorité essentielle si l’on veut qu’un euro numérique puisse contribuer au maintien de la confiance dans les paiements à l’ère numérique.”
Voici donc les trois grands thèmes à explorer :
La centralisation (et non le contraire), la fin du payement en espèce (donc une satisfaction des autorités puisque le contrôle sur les transactions financières est absolu) et enfin le contrôle total des données financières internes. En bref, tout ce qui échappait avant aux autorités, désormais ne leur échappera plus !
Facebook et libra…
Lorsque j’ai entendu parler pour la première fois de Libra – cette monnaie virtuelle initiée par Facebook et Mark Zuckerberg – je n’ai pas pu m’empêcher de penser que nous avions une opportunité extraordinaire de pouvoir sortir le monde de la pauvreté une bonne fois pour toute. Imaginez un instant si nos actions sur Facebook pouvaient générer des crédits en monnaie numérique Libra ? Mieux encore, imaginez que ces crédits puissent être dépensés sur Amazon ou sur l’ Apple Store ? » Oui, cela ressemble à une économie parallèle absolument utopique. Impossible de fait, puisque de toute façon cela échapperait aux Etats et que cette nouvelle économie serait mise dans les mains des grosses entreprises technologiques américaines. Une chose absolument insupportable – sauf peut-être pour l’administration américaine – on peut s’en douter !
Exit donc le formidable potentiel qu’aurait pu représenter une monnaie alternative comme Libra et retour au réel…
Ne vous attendez pas à des miracles…
Faut-il attendre des monnaies numériques qu’elles fassent des miracles ?
La réponse est simplement… NON !
Ces monnaies numériques sont amenées à remplacer l’argent en espèce, c’est clair, mais elles ne vont rien vous amener de plus dans votre quotidien. Bien entendu, des pays comme la Chine vont pouvoir s’aligner à l’international sur des devises phares comme le dollar US, et forcément le paysage économique mondial va s’en trouver légèrement modifié. Peut-être même qu’elles permettront une centralisation de différentes monnaies. Mais ce qui semble clair, c’est que vous allez devoir ouvrir un portefeuille numérique qui sera directement connecté à vos comptes bancaires personnels. De là à imaginer une uniformisation totale des transactions financières, il n’y a qu’un petit pas. J’entend par là que nous pourrions, demain, vivre dans un monde dans lequel, seule, la banque européenne puisse être le titulaire de l’intégralité de ces portefeuilles numériques et que les banques ne deviennent ni plus ni moins que de simples acteurs financiers secondaires. En quelque sorte, votre compte virtuel serait livré avec votre identité. Dans tous les cas de figure, si les Etats se ruent vers les monnaies nationales numériques, ce n’est certainement pas pour votre intérêt personnel, mais plutôt à des fins de contrôle pointus sur les populations. Rien de plus étonnant que le gouvernement chinois ait été le premier à emboîter le pas et que l’administration américaine – quant à elle – aie décidé, du moins jusqu’ici, de déléguer cette tâche à Facebook.
Je vous laisse sur ce questionnement :
Et si on parlait d’une monnaie mondiale unique, ne serait-ce pas plus avantageux pour chacun de nous ?
différent…