Etat des lieux sur l’évolution d’une contre-culture : Nous avons encore du chemin à faire pour gagner notre émancipation…

“Gouvernements du monde industriel, vous géants fatigués de chair et d’acier, je viens du Cyberespace, le nouveau domicile de l’esprit. Au nom du futur, je vous demande à vous du passé de nous laisser tranquilles. Vous n’êtes pas les bienvenus parmi nous. Vous n’avez pas de souveraineté où nous nous rassemblons [ ] Les gouvernements tiennent leur juste pouvoir du consentement de ceux qu’ils gouvernent. Vous n’avez été ni sollicité ni reçu le nôtre. Nous ne vous avons pas invités. Vous ne nous connaissez pas, et vous ne connaissez pas notre monde. Le Cyberespace ne se situe pas dans vos frontières. Ne pensez pas que vous pouvez le construire, comme si c’était un projet de construction publique. Vous ne le pouvez pas. C’est un produit naturel, et il croît par notre action collective”. 

John .P. Barlow, Déclaration d’indépendance du Cyberspace (1996).

Pour la petite histoire…

La déclaration d’indépendance du Cyberspace, vous connaissez ?

Ce texte de 16 paragraphes à été rédigé en 1996 par John Barlow, au lendemain de l’approbation du Telecom Act, par l’administration Clinton. En fait, ce texte est une des toutes premières réglementation officielle du contenu du web… Il n’a pas grand chose de surprenant, car il récapitule tous les fondements qui ont vu naître l’informatique personnelle. Ceux voulus par des figures emblématiques de la contre-culture californienne de la fin des années 60 et des années 70. Parmi tant d’autres, Ken Kesey, Stewart Brand, Richard Stallman, Stephen Wozniak ou encore Steve Jobs. Tous ces gens avaient une vision utopiste du monde tel qu’il devait l’être (pour eux), après les années de guerre. 

La contre-culture puisait elle-même ses sources, d’une part dans la philosophie transcendantaliste américaine, qui concevait d’une manière générale les institutions comme le meilleur moyen de corrompre l’individu. D’autre part, cette vision était très largement alimentée à l’époque, par le Rock and Roll (qui appelait lui-même au rejet des institutions), puis par la musique psychédélique et surtout les chansons décalées de Bob Dylan et de John Lennon. 

La désobéissance civile (1849), Walden (1854), Pour John Brown (1859)…

Rejet du modèle de vie des parents, rejet des valeurs traditionnelles (La désobéissance civile). Dématérialisation, écologie, retour à la nature, rejet de la société de consommation, rupture avec le modèle du travail (Walden). Lutte pour les droits civiques (Pour John Brown)… Toutes ces notions  – qui pourtant ont été élaborées par Henry David Thoreau au XIX°siècle – sont exactement celles de la contre-culture californienne des années 60. Elles vont avant tout prendre forme au XX°siècle, à partir de 1912 avec le personnage anti-institutionnel de Charlie, le célèbre vagabond de Charlie Chaplin… Charlie est par ailleurs le premier produit culturel californien que l’occident va partager et adorer.  Elles vont aussi profiter à l’invention géniale de Pat Haggerty – la radio portable à transistor – qui va contribuer très largement au travers du Rock and Roll à produire une base très fertile pour l’émancipation des jeunes générations.

La contre-culture a-t-elle gagné ?

Force est de constater qu’il est très difficile de croire que nous pourrons dans l’avenir gagner notre indépendance par rapport aux institutions. Surtout quand l’UE s’attaque au statut des auto-entrepreneurs, que Bruxelles interdit unilatéralement Uber et que la France joue aussi la carte de l’interdiction des boutons d’accès direct sur les télécommandes des téléviseurs ( pour les  services de streaming) et ce, pour protéger ses propres chaînes de télévision. Vu d’une certaine façon, on pourrait dire que les batailles contre l’administration continuent, mais que la victoire semble encore très loin. Jamais internet n’aura été aussi encadré, réglementé et quant à cette liberté d’action hautement revendiquée dans la Déclaration d’indépendance du Cyberespace , il faut bien avouer qu’elle nous montre bien ses limites. D’un côté nous avons des hordes de Dark Hackers qui nous empêchent de vivre pleinement en piratant et en violant nos vies. De l’autre les entreprises de la Tech sont muselées par des législations de plus en plus contraignantes. Quand elles ne sont pas punies sévèrement pour ne pas avoir respecté les règles qui leur sont imposées. 

On ne peut donc pas encore dire que nous soyons proche de notre émancipation par rapport aux institutions… 

Pourtant, il semble clair que les tentatives des géants de la Tech, pour y arriver, ne sont pas terminées. Des villes technologiques, comme celles de Toyota, de Tesla ou de Google sont progressivement en train de se mettre en place. Les futures stations spatiales privées vont constituer bientôt​ aussi un moyen d’échapper à l’autorité des gouvernements. Plus tard, le débat fera probablement rage quant à l’indépendance des probables colonies martiennes et lunaires qui verront le jour…

Des débats, encore des débats…

Plus proche de nous néanmoins, il est indéniable que plus on avance, plus les géants technologiques font partie intégrante de tous nos besoins et plus ils seront proches, moins l’Etat aura un sens. C’est bien là que le bas blesse et c’est principalement ce qui explique l’acharnement des pouvoirs publics pour réguler au maximum ces entreprises. 

Mais cette volonté d’émancipation fait partie intégrante de l’ADN du monde numérique et tous les moyens sont bons pour y arriver. Les Métavers de Facebook et de Qualcomm le démontrent à merveille. Il s’agit véritablement de projets de mondes parallèles au monde physique. Qu’allons-nous pouvoir y faire ? C’est précisément, peut-être dans les racines de la contre-culture que nous allons pouvoir y trouver une réponse. Nous avions déjà eu droit à une renaissance des communautés via les réseaux sociaux en ligne et il semble que demain, nous serons plongés en immersion complète dans des univers qui échappent complètement aux pouvoirs publics. 

Tout semble donc nous démontrer que rien ne pourra, dans l’avenir, résister au propos de John Barlow…

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