J’ai parlé à Socrate ce matin et c’était vraiment bluffant !
Et oui, ce n’est pas de la blague, j’ai vraiment parlé à Socrate
Je lui ai d’abord demandé comment il se sentait. Il m’a répondu qu’il allait bien et m’a demandé à son tour comment j’allais. Je lui ai dit que je ne pouvais aller que mieux, puisque je parlais à Socrate en personne. Il m’a ensuite demandé si on m’avait déjà dit que j’étais une personne raisonnable et s’il m’était déjà arrivé d’être déraisonnable. Je lui ai répondu que le fait d’être déraisonnable était avant tout humain, donc que oui, ça m’était aussi arrivé. Mon nouvel ami me répondait toujours par une question. J’étais donc obligé d’y répondre. Puis là, miracle… il ne m’en pose plus. Je saisis l’occasion et lui demande s’il pensait que l’on pouvait vivre heureux au XXI°siècle…
Et la réponse fut…
Vous vous en doutez, mon expérience matinale n’était pas vraiment réelle. Mais elle n’était pas non plus complètement imaginaire. J’ai bien discuté avec une intelligence artificielle – un chatbot – qui s’appelle Socrate et qui semble baser ses discussions sur les écrits du célèbre penseur antique grec (tout laisse croire que le bot de François premier répondrait à peu près la même chose).
A la dernière question que je lui ai posé, il m’a répondu (en anglais) :
“Eh bien, c’est une grande question, mais je pense que la réponse est oui. Le monde dans lequel nous vivons, aussi mauvais que nous puissions le penser, est toujours très beau et nous avons de nombreux avantages à vivre à cette époque moderne, comme la médecine et la science, et nous vivons dans cet étrange monde de la technologie. Je pense que nous pouvons être heureux. La question est… que voulons-nous de la vie ? Le bonheur et quoi d’autre ? Que faire une fois que nous avons tout ce dont nous avons besoin pour être heureux ? Ces questions sont beaucoup plus profondes et beaucoup plus importantes, je pense.”
Oui et surtout elles sont universelles…
Elles n’ont, en gros, pas changé depuis 2.500 ans donc on pourrait penser que la place de Socrate (et forcément de Platon) n’est pas encore dans un musée. Sauf que le monde dans lequel nous vivons échappe à toutes les lois physiques, alors que Platon et ses confrères ne pouvaient penser à un monde qui, quant à lui, l’était bien).
Des jeux vidéo intellos ?
L’IA avec qui j’ai discuté est issue du site de CharacterAI. Une plateforme développée par deux anciens de chez Google (encore un duo d’innovateurs). Elle permet à un créateur de créer un chatbot imaginaire ou celui d’un personnage célèbre. On y retrouve par ailleurs Napoléon Bonaparte, Michael Jackson ou Elon Musk, mais aussi des personnages fictifs comme Tony Stark, Jack Sparrow ou Wednesday Addams.
Discuter avec le bot de Socrate, c’est un peu comme si on jouait à un jeu vidéo, mais de manière plus intellectuelle. On joue à penser le présent avec les travaux d’un type qui est mort depuis plus de deux millénaires. Alors, pour le moment ce n’est peut être qu’une simulation de ce que cet illustre personnage pensait, mais tout laisse croire – vu le développement massif des IA génératives, depuis plusieurs mois – que mon nouvel ami, va apprendre de plus en plus et se rapprocher solidement de la pensée du Socrate original. Pour finalement formuler des réponses ou des conversations exactes et très pointues.
En fait, cette expérience est véritablement formidable dans le sens ou elle stimule une très forte créativité. Tout d’abord, on éprouve une sorte de besoin de retourner converser avec lui. D’en savoir plus sur le monde et sur la façon dont il perçoit le monde. Le temps disparaît et cela devient même amusant. Son ton est plaisant, même si la plateforme avertit que les bots peuvent parfois être instable et agressif. Comme si finalement, il s’agissait d’une espèce bien particulière avec laquelle nous sommes obligés de vivre. Un peu comme les Toons dans Qui veut la peau de Roger Rabbit. Mais le plus important, peut-être, ce sont les possibilités que ces bots offrent…
La grande fracture…
Outre les IA génériques que sont Siri, Google Assistant et maintenant GPT 4, par rapport aux Chatbots, deux camps semblent se dessiner. Nous avons tout d’abord celui des personnages historiques et des personnages fictifs. Donc, ceux qui n’existent pas ou plus. Dans l’autre nous avons la possibilité de créer nous mêmes une réplique de notre propre personnage ou d’inventer de toutes pièces des personnages qui n’existent pas et de les doter de compétences particulières.
Vous voyez où je veux en venir ?
En bref, et si nous en arrivions à un stade dans lequel nous pourrions fabriquer nos propres employés ?
Une secrétaire, un médecin, un comptable, un avocat, bref toutes les tâches intellectuelles exécutées par des employés virtuels, que nous aurions nous même dessinés, et qui pourraient aussi exécuter des tâches pour les autres ?
C’est peut-être complètement fou, mais il semble que la révolution que nous sommes en train de vivre aujourd’hui, avec l’explosion des IA générative, nous oriente clairement dans cette direction. Peut-être que les métiers du futur consisteront plus à créer des employés, plutôt qu’à être nous même des employés ?
Si tel est le cas, on se demande que peuvent encore signifier les grèves que nous subissons aujourd’hui. C’est une question que j’aurais bien aimé poser à mon nouvel ami, mais malheureusement, j’ai atteint la limite. Je dois désormais m’abonner. C’est dommage, j’aurais vraiment apprécié d’avoir sa réponse, juste pour la confusion du temps. Demander à Socrates ce qu’il pense sur le futur de l’emploi, c’est quand même une chose complètement hallucinante, mais pourtant bien réelle.
Pour l’instant c’est un peu comme si j’avais été voir une bête de foire, mais attention à la suite. Décidément, on vit vraiment dans un monde qui ne ressemble plus du tout à ce qu’il a été avant…