A quand le magasin sans contact ?

Devrait-on se demander si le magasin sans contact va devenir la norme dans la grande distribution ?

Oui et non, mais peut-être serait-il plus intéressant de se demander sur quel endroit de la planète il va devenir une norme. Il est clair que si l’idée séduit certains acteurs du secteur, en revanche il est difficile d’imaginer que la pilule passe facilement dans les pays où les syndicats font la loi…

Un commerce qui devient lui aussi une entreprise technologique…

Vous le savez probablement, la première entreprise à avoir mis en place un magasin de détail dans lequel vous ne voyez aucun humain, c’est Amazon avec ses surfaces Amazon Go. Notons au passage qu’une surface dans laquelle vous ne croisez personne, n’est pas forcément un magasin dans lequel personne ne travaille. Donc mettons de côté l’apoc​alypse du licenciement – nous verrons plus bas que c’est tout le contraire – car il s’agit tout simplement de dissocier le lieu où les gens travaillent de celui fréquenté par le client. Oui c’est certain, il n’y a plus d’employé à la caisse. En revanche, la logistique qui y est développée y est beaucoup plus importante. Notons aussi que de plus en plus, le magasin se rend aussi chez le client pour lui livrer ses courses. Le système n’est d’ailleurs pas nouveau, car au XX°siècle il était courant qu’un employé d’épicerie fasse une livraison dans son quartier car des gens – âgés par exemple – ne pouvaient pas se déplacer. Il n’est d’ailleurs pas non plus surprenant d’observer la volonté d’Amazon, d’entrer dans le secteur de la grande distribution, non en livraison mais bien en physique. En rachetant (et en transformant) notamment la chaîne de magasins bio, Whole Food. De fait, le but recherché depuis toujours par l’entreprise de Seattle est la livraison express. Ce que vous commandez doit être livré dans les deux heures, voire même dans l’heure, voire même à une heure précise. Et pour arriver à cela, il est nécessaire d’avoir des magasins qui se trouvent à proximité des gens. 

Une grande surface qui devient un intermédiaire avec l’entrepôt…

Des magasins à proximité des gens, c’est d’ailleurs ce qu’avait bien compris le plus gros concurrent d’Amazon, Walmart – qui par ailleurs réussit parfaitement sa transition numérique – dont la stratégie était d’implanter une grande surface a moins de 15 kilomètres de chaque américain. 

Pour parvenir à l’objectif de la livraison ultra rapide, voire même temporelle à la minute prêt, il faut surtout et avant tout pour cela une technologie de pointe et un personnel disponible pour réagir très vite. Amazon à très bien compris qu’il était plus important de concentrer les efforts du personnel sur la logistique, plutôt que sur le client. En fin de compte quand vous allez faire vos courses, vous ne cherchez pas du tout un service après vente. Ce que la plupart d’entre-nous veulent c’est avant tout des produits de qualité et les plus frais possible et tout cela en un minimum de temps. Le contact client n’a pas vraiment de valeurs dans la grande distribution alimentaire, bien au contraire. C’est la logistique en amont qui fera que le client sera satisfait ou pas. 

Si on revient un instant sur la problématique de la destruction de la profession de caissier de supermarché, il semble ici que nous soyons clairement dans une phase de destruction créatrice sur plusieurs points (rappelons que du personnel doit entretenir les rayons). Tout d’abord sur les nécessité de préparation des commandes. Ensuite sur le potentiel de livraison. D’autres part, un magasin sans contact, c’est avant tout une expérience client. Et une expérience client c’est la philosophie même d’une entreprise. Elle s’entretient drastiquement, quelle que soit la dépense en énergie qu’il faut y consacrer. Enfin ces surfaces bourrées de technologies nécessitent de nombreux spécialistes du numérique pour le côté gestion,logiciels et Data, mais aussi des techniciens pour placer et entretenir les réseaux de caméras, de capteurs, d’éclairage spécifiques, éventuellement de drones, etc. 

Des magasins ultra modernes, oui mais pour qui ?

Vous l’aurez probablement compris, même​ si les caissiers de supermarché vont disparaître – il fallait par ailleurs s’y attendre il y a vingt ans – l’avenir de l’emploi dans la grande distribution n’est pas du tout obscur, bien au contraire​. La question est maintenant de savoir si nous aurons cette opportunité, nous qui vivons en Europe francophone, d’avoir ce type de magasins sur le territoire. 

Les américains, comme on peut s’en douter, sont déjà dans la course et il ne fait aucun doute que les principaux pays technologiques asiatiques vont généraliser eux aussi les magasins sans contact. On vient d’apprendre que la chaîne de supermarché Carrefour​ lance elle aussi son système Carrefour City + à… Dubaï. Qu’en sera-t-il donc de nos chères contrées dans lesquelles on peut voir un raz de marée syndical exploser, quand il s’agit d’introduire des caisses électroniques dans les grands magasins ?

On le voit tous les jours, l’intérêt du consommateur n’est jamais que relatif aux préoccupations de l’entreprise. Il n’en est pas du tout de même​ pour ceux que l’on nomme chez nous les partenaires sociaux. Même si on peut espérer que les magasins sans contact se généraliseront un jour chez nous, force est de constater que cela ne se fera pas sans problèmes. Par exemple, du côté politique, il va falloir s’attendre à des réactions négatives (comme souvent). Du côté du personnel des supermarchés, qui traditionnellement est réticent à toute forme de changement, il en sera de même. Enfin, il y a aussi les consommateurs qui devront vivre une nouvelle expérience qui pourrait leur déplaire car elle est trop différente de ce qu’ils connaissent. Parmi ceux-ci, on peut aussi mentionner ceux qui refusent de se passer de caissiers car ils craignent la destruction d’emplois. 

Toujours est-il que ces magasins sans contact deviennent une plateforme technologique et qui dit plateforme technologique dit aussi centre de collecte de données. La question qu’il convient de se poser maintenant est de savoir si ce type de technologie va émigrer vers les commerces de proximité plus petits ?

Cela pourrait être intéressant de pouvoir avoir son propre magasin – ouvert sans arrêt – et de ne pas être forcé de rester sur place. De cette manière, son propriétaire pourrait se concentrer sur d’autres choses importantes. Cependant, on rencontre ici une contradiction car le moyen de se démarquer des colosses de l’économie quand on est petit, c’est bien la proximité avec le client et dans beaucoup de cas, le service après vente. Donc peut-être que ces surfaces technologiques vont finalement redonner un coup de jeune à la petite épicerie. 

Toujours est-il que si on veut éviter la déconnexion, il va falloir accepter que le magasin sans contact devienne une norme dans notre vie et ça va prendre encore du temps…

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