La Chronique du 8 mars…

Vous n’êtes certainement pas sans savoir que les entreprises technologiques deviennent de plus en plus puissantes. Tellement puissantes qu’elles peuvent se permettre d’engager un véritable bras de fer avec les institutions politiques (et industrielles)…

C’est un phénomène qui n’est certes pas nouveau, mais on avait rarement vu dans l’histoire de telles tensions entre des organismes privés et publics. 

Les raisons qui me font aborder ce sujet aujourd’hui sont doubles :

D’une part, Google vient de rejoindre le groupe des frondeurs qui ont décidé de reporter sur leurs clients les différentes taxes imposées par les gouvernements anglais, turques et français aux géants du numérique. Notamment la très controversée taxe GAFA qui a fait monter l’administration Trump au créneau en 2019. Son successeur, Joe Biden, ne semble pas vraiment vouloir marcher sur une voie contraire. D’autre part, c’est Samsung qui joue la carte de l’intimidation auprès des autorités texanes et demande un milliards de dollars de réductions fiscales pour agrandir son usine d’Austin et pour employer plus de personnes. 

Samsung est bien entendu en position de force car il est non seulement un acteur majeur dans la production de semi-conducteurs, mais il est surtout un des rares acteurs majeurs du domaine implanté sur le sol américain. Hors, nous savons que le monde accuse une pénurie sévère de semi-conducteurs et que les administrations des pays les plus influents (en termes de technologie) n’ont d’autres choix que de se mettre à genoux devant ces producteurs devenus tout aussi importants aujourd’hui que ceux qui traitent les données pour entraîner les intelligences artificielles du futur.   

En d’autres termes une administration, même américaine, n’est plus en mesure de négocier avec ces géants technologiques car c’est une grosse partie de l’industrie traditionnelle qui en dépend aujourd’hui. L’industrie des transports se trouve sur les genoux sans un approvisionnement raisonnable de semi-conducteurs. Qu’en sera-t-il quand chaque objet que nous utilisons au quotidien sera truffé d’électronique ?

Nous découvrons ici, grâce aux confinements successifs, une de nos nouvelles faiblesses. Et celle-ci n’est autre qu’une dépendance accrue à des objets minuscules. 

On sait aussi que l’UE veut marcher sur la voie de l’indépendance technologique et que cette indépendance passe elle aussi par la production de semi-conducteurs. Cependant, le chantage effectué par Samsung démontre qu’aujourd’hui, l’enjeu est tellement important que le simple fait de posséder un pouvoir de production peut se révéler être aussi une arme à double tranchants en matière de fiscalité. 

Que se passerait-il en effet si Samsung décidait de quitter cette ville (Austin) qui se profile désormais comme un pôle technologique de premier plan ?

Que se passerait-il si le coréen décidait tout simplement de retourner en Corée ?

Pire encore, que se passerait-il si le gouvernement chinois offrait à Samsung toutes les ressources pour installer une méga usine sur son sol, en lui demandant bien entendu de délaisser le territoire américain ?

Autant dire qu’à l’heure actuelle ce serait une véritable catastrophe, non seulement pour les États-Unis – si l’on part du point de vue qu’il est plus facile de s’entendre avec les américains, qu’avec les chinois – mais aussi pour l’occident

Bref, plus que jamais nous sommes soumis à la technologie…

Revenons-en à Google…

Troisième acteur du numérique ayant décidé de reporter le coût de la taxe GAFA, après Amazon et Apple, Google commence à montrer doucement les dents. Hors l’entreprise créée par Larry Page et Sergey Brin, s’est souvent jusqu’ici montrée docile par rapport aux décisions de justice…

Hors, de l’autre côté, l’administration américaine actuelle n’a clairement pas l’intention de faire marche arrière sur les positions prises par l’administration Trump. Donc non seulement, les pays imposant cette taxe au GAFA (et aux autres acteurs importants du secteur) seront sanctionnés par des taxes sur leurs propres produits, mais en plus se sont les entreprises locales qui seront sanctionnées par une hausse des prix. Autant dire que d’une manière ou d’une autre, c’est toujours le client final qui paye…

Ces deux exemples démontrent une manifestation très claire d’une nouvelle puissance et d’une dépendance certaine au secteur technologique. Sans semi-conducteurs, on ne peut même plus produire une voiture ou un avion. Cette dépendance force les administrations respectives des puissances technologiques à se ranger aux côtés de leurs champions, quitte même à s’engager dans une guerre commerciale sans merci.

Cela fait maintenant 50 ans que la contre-culture californienne est en marche et je le répète, elle vise purement et simplement à une réduction drastique des responsabilités des États.

Nous avons aujourd’hui deux exemples concrets d’entreprises qui ne sont plus prêtes à se plier à des règles établies au siècle passé et tout laisse supposer que ce n’est pas fini du tout…

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