Les dangers du revenu universel…

On en parle souvent… Il semble que le Revenu Universel (RU) soit la solution ultime à une généralisation de l’intelligence artificielle, qui selon certaines prévisions, va envoyer au chômage un nombre non négligeable de personnes.

De nombreuses versions ont été envisagées mais deux tendances semblent ressortir… L’une attribuerait un Revenu Universel aux victimes des NBIC… ceux qui n’ont pas de travail. L’autre attribuerait un RU à tous les résidents d’un pays quels que soient leurs revenus. En d’autres termes une assurance chômage indéterminée, grâce à laquelle personne n’aurait l’obligation de travailler.

Un rêve qui remonte à bien longtemps et qui à pris une ampleur toute particulière lorsque François Hollande à quitté le pouvoir en 2017. Un rêve qui peut présenter néanmoins certains dangers…

Le premier est d’ordre économique. Le RU est en effet, une entreprise difficile à mettre en œuvre en terme de financement. De plus quel impact aurait-il sur les entreprises et sur l’économie en général ? Serait-il suffisant pour que l’on puisse en vivre ?

Et les questions ne s’arrêtent pas là, car une des plus grosses failles du RU serait de créer deux castes : l’une composée de gens utiles à la société. Celle qui travaillerait dans le monde numérique et plus largement dans celui des NBIC. En bref là où le travail serait disponible. L’autre caste serait quand à elle, celle des inutiles. C’est à dire une catégorie qui serait supportée financièrement par la première, faute d’avoir les qualifications nécessaires pour pouvoir travailler sur le marché du numérique. Il n’est pas certain, à terme que cela plaise à la partie qui paye. Et il n’est pas non plus certain que le fait d’être renvoyé dans la catégorie des inutiles soit bien perçue par l’autre partie.

Une Uberisation salutaire

Pour cette deuxième caste, celle des inutiles, l’Uberisation, alors qu’elle est mal perçue en Europe – car elle contredit sur bien des points le rapport entre employé et employeur – pourrait très bien compenser, pour une partie de la population, le complément que le revenu universel ne pourrait pas donner. Car les estimations qui ont été faites à ce jour sont inférieures à 1000 euros par mois. La Finlande, qui était le premier pays européen à se lancer dans son expérimentation se basait sur la somme de 560 euros. Mais on peut considérer que dans les prochaines années, le revenu universel serait établi sur base du seuil de pauvreté, fixé à 855 euros. La personne qui serait supportée par le revenu universel toucherait ainsi environ 10,000 euros par année.

Autant dire qu’avec cette somme, il faut avoir des besoins très modestes pour ne pas éprouver la nécessité d’arrondir ses fins de mois. Une profession Uberisée, dans ce cas pourrait très bien se marier avec un revenu universel et permettre aux personnes non qualifiées d’effectuer des travaux de services sans véritablement être professionnel dans un secteur précis (chauffeur, livreur ou encore bricoleur). Les plateformes comme Amazon Home Services ou Uber permettent par ailleurs à presque tout le monde de travailler instantanément. Au final, nous aurions donc une catégorie d’individus qui serait assimilée au monde de la débrouille. Ce qui quelque part, si l’on considère la crise économique et sociale qui se profile dans la décennie qui arrive, pourrait être une solution relativement efficace pour « sauver les meubles ».

Un problème important : Absorber les aides sociales…

Tout cela est peut être beau dans les grandes lignes, mais si on lit entre celles-ci, les choses ne sont pas aussi simples. Car l’application du revenu universel demande énormément d’argent. Mateo Alaluf et Daniel Zamora évaluent dans Contre l’Allocation Universelle, qu’un RU exigerait une levée de fonds pour la France d’environ 660 milliards d’euros par an. C’est beaucoup d’argent !

Mais la première question à se poser, avant même le fait des se demander comment trouver les fonds pour le financer, est « faut-il que le revenu universel engloutisse les aides sociales ou pas ? « .

Et sur ce point, si elle disparaissent, il n’est pas certain que cela plaise à la population qui bénéficie de ces mêmes aides sociales. De plus la riposte des syndicats risque de se faire entendre.

Où trouver les fonds ? Une première piste…

La première piste explorée pour financer le RU, est celle soutenue par le candidat socialiste, Benoît Hamon pendant la campagne présidentielle française en 2017. Celle-ci suit une logique (cela nécessite de s’entendre sur le terme) qui considère que si c’est la machine qui prive l’humain d’un emploi, alors cette dernière doit être pénalisée par une taxe (elle (son propriétaire) doit payer pour avoir le droit de travailler).

Si l’on suit cette logique – l’approche est intéressante – un des problèmes qui se pose est que la machine est souvent dématérialisée, et devient de ce fait un robot numérique qui prend la (simple) forme d’un logiciel ou d’une application.

La réalité est qu’en taxant ces robots numériques, c’est aussi nous, les consommateurs de ces derniers qui seront pénalisés. Réduisant de ce fait l’accessibilité à certains de ces produits. Touchant notamment de plein fouet la catégorie d’individus qui serait bénéficiaire du RU. Celle là même qui devrait bénéficier des outils numériques nécessaires pour exercer une profession Uberisée. De plus, faire monter les prix des produits issus des NBIC ne semble pas être une très bonne idée, à l’heure même d’une ère numérique qui est en train de mettre en place une société dans laquelle le coût marginal 0 (ou presque) se généralise.

Autre problème et non le moindre, taxer la machine, c’est aussi faire baisser la compétitivité des entreprises. Entreprises qui risquent de partir vers des pôles technologiques qui offrent des écosystèmes propices au développement de l’économie. Aux États-Unis bien sûr, dans la Silicon Valley, mais aussi à Toronto, à New York, à Londres, à Berlin, à Sydney, à Santiago, etc. Ces villes offrent des infrastructures propices aux développement des startups, notamment avec une fiscalité et des règlementations plus souples. Ce phénomène aurait de plus un effet secondaire dévastateur, comme celui du départ des cerveaux vers ces mêmes pôles technologiques. Cerveaux qui sont les seuls aptes à développer une économie numérique en Europe, à un moment ou nous en avons vraiment, voir cruellement besoin.

Deuxième piste : Taxer l’emploi…

Dans une telle situation, l’état qui applique le RU, n’aurait d’autres solutions que de se retourner sur ceux qui travaillent. Si l’on garantit en effet, à la population des revenus fixes, il est alors naturel (ici encore, il faut s’entendre sur le terme) de surtaxer la main d’œuvre. Exactement comme on le fait pour financer la sécurité sociale.

Nouvelle question, quelle ampleur prendrait cette surtaxe ?

,Sans grand calculs, impossible de le dire… Mais on peut penser – au regard des sommes qu’exigeraient le cumul des aides sociales, du RU, de la sécurité sociale ainsi que celui du fonctionnement de l’état – qu’elle pourrait bien ronger une forte partie d’un salaire. D’autant plus qu’avec la montée en puissance de l’intelligence artificielle, le nombre des emplois marchands va inévitablement chuter dans les prochaines années. Même si les études montrent que la destruction d’emploi sera positive, tout semble indiquer qu’il n’y aura de place que pour les personnes hautement instruites et pas pour les autres.

On peut prévoir de ce fait, les différentes réactions de la population par rapport à une surtaxe de la main d’œuvre : J’adhère au système, si c’est comme ça je ne fais rien, je m’en vais ou bien encore je triche ! Au vu de l’ampleur du travail au noir dans les pays européens dans lesquels la fiscalité est lourde, on peux se douter que ce quatrième type de comportement va concerner une grande partie de la population.

Et c’est particulièrement préoccupant pour la démocratie et pour la liberté car la tricherie risque d’accentuer encore un peu plus les contrôles des activités des individus. Donc de nous faire basculer dans une dictature fiscale. Ce qui n’est une bonne chose pour personne.

L’Europe à raté son entrée dans l’ère numérique. Mais on peut soutenir aussi qu’il n’est pas encore trop tard pour ouvrir la porte. Un revenu universel généralisé risquerait de faire basculer toutes nos chances de rentrer dans la course en accentuant la polarisation et en forçant les migrations vers des horizons économiquement plus favorables.

S’il semble que la solution au licenciements massifs, qui vont se produire dans la prochaine décennie soit le revenu universel, il comporte aussi de nombreux dangers qu’il vaudrait mieux commencer par analyser en détail, avant de s’aventurer dans ce pari hasardeux, car il risque bien d’entraîner notre chute.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Résoudre : *
5 × 1 =


Articles similaires

Commencez à saisir votre recherche ci-dessus et pressez Entrée pour rechercher. ESC pour annuler.

Retour en haut