Nous avons raté 2008, raterons-nous aussi 2020 ?

Il y a encore un peu moins de 15 ans de cela, nous avons eu l’opportunité extraordinaire de décrypter une situation catastrophique que nous aurions pu voir venir bien avant l’heure et malheureusement, nous n’avons pas eu le pouvoir de le faire. Nous avions, à cette époque (comme d’habitude) le nez plongé dans nos soucis et cela nous a empêché d’y voir plus clair, malgré les multiples données que nous pouvions analyser en ces moments historiques. 

La crise financière de 2008, alors qu’elle nous tirait par le bas, nous faisait basculer dans un monde dont nous ne connaissions rien. Ou peut-être plutôt que nous ne voulions pas connaître à l’époque, parce que nous étions fortement attachés à ce que nous connaissions… notre cher XX°siècle

Ce qu’il n’aurait pas fallu manquer…

L’année qui a précédé la crise de 2008 a été exceptionnelle en termes d’innovations. Nous n’en avons rien vu. Même des spécialistes qui se penchaient sur la question ne voyaient rien de ce qui était en train de se passer. Thomas Friedman par exemple, lui-même chroniqueur au New York Times avait dès 2004 publié un livre sur le XXI° siècle. Les choses allaient tellement vite que l’année qui suivit, il a dû publier une mise à jour du même ouvrage. Et de même encore en 2006. En 2007, il n’a pas renouvelé l’opération, pensant qu’il n’était plus nécessaire d’aller plus loin. Il confessera néanmoins dans un ouvrage écrit une dizaine d’années plus tard que c’était justement cette année-là qu’il fallait analyser, car c’est en 2007 que le monde bascule dans ce que l’on va appeler l’ère numérique. Cette année-là, c’est avant toutes choses celle où Steve Jobs va présenter cet objet révolutionnaire qu’est l’IPhone. Mais c’ est aussi la capacité de stockage qui explose avec Hadoop. C’est le début du big data. GitHub permet désormais de pouvoir collaborer sur une plateforme pour écrire et développer des logiciels en Open Source. Facebook – alors qu’il n’était qu’un réseau social réservé aux étudiants – s’ouvre au grand public. Tweeter s’ouvre elle aussi au monde. Change.org arrive en même temps. YouTube appartient désormais à Google. C’est aussi le début d’Android, du Kindle et de Airbnb. Un milliard de personnes utilisent alors internet. Palantir Technologies lance un algorithme qui va révolutionner les méthodes de pistage des terroristes et des fraudeurs. Michael Dell reprend ses fonction de CEO après avoir réalisé que le tournant technologique qu’il avait abandonné deux ans avant ne devait pas se rater. David Ferucci commence à élaborer le super ordinateur Watson chez IBM. Intel introduit un matériau sans silicium qui dope de manière conséquente la puissance des microprocesseurs. 2007, c’est enfin une révolution dans le domaine de la Clean Power Revolution : l’énergie solaire, l’éolien, les biofuels, les systèmes d’éclairage LED, le développement des green buildings et des véhicules électriques explosent. Enfin, le séquençage de l’ADN chute verticalement pour ne plus coûter qu’une bagatelle alors que quelques années auparavant, l’addition de l’analyse de l’ADN d’une seule personne coûtait 100 millions de dollars. 

Bref, on comprendra que tout a changé cette année-là…

De la fumée dans les yeux…

Pourquoi à l’époque, n’avons nous n’avons rien vu de tout cela ?

Que Thomas Friedman se rassure, nous devons avant tout accepter que même si nous avions eu véritablement conscience de toutes ces innovations, nous n’aurions en aucun cas pu imaginer l’impact qu’elles auraient sur le monde. Jamais nous n’aurions imaginé ce que l’IPhone allait avoir comme conséquence sur la dématérialisation de l’économie. Jamais nous n’aurions pu concevoir que Youtuber deviendrait la profession la plus sexy pour les jeunes générations. Jamais, nous n’aurions pu croire que des réseaux sociaux deviendraient la norme pour communiquer avec les autres, voir même bien plus que cela, puisque maintenant des plateformes comme Facebook cumulent à la fois les facilités pour les contacts sociaux, mais aussi des services de rencontre, de télécommunication, une place de marché, voir même des services bancaires. Nous n’aurions jamais pu croire à la Green Révolution et que Tesla remporte son pari de faire basculer le monde du pétrole tout entier.

Bref, les choses étaient impossibles à prévoir car nous étions à un moment charnière de l’histoire. La plupart des innovations que nous avons citées ci-dessus était en elles- mêmes des révolutions à part entière. Pour le dire autrement, nous nous sommes retrouvés à un moment de l’histoire, similaire à la période ou l’électricité, le téléphone, le moteur à essence couplé du démarreur électrique, la production de masse, la radio, la télévision ainsi que l’énergie nucléaire sont arrivés dans les vies de nos ancêtres. Eux aussi n’auraient jamais été capables d’imaginer ce que deviendrait le monde d’après. Ces révolutions ont généré elles même des problématiques qui ont à leurs tours généré des nouveaux comportements, qui ont incité les entreprises et les administrations à aller dans le sens dans lequel le vent soufflait. 

Comment prévoir l’avenir dans ces cas-là ?

La règle d’or… Après une crise, rien n’est plus jamais pareil…

Les crises du XXI° siècle, par rapport aux crises des siècles précédents sont différentes en ce sens que nous sommes aujourd’hui, en permanence au tournant de nouvelles évolutions significatives. Dans les siècles passés, les situations qui succédaient à une crise n’étaient guère différentes de celles qui les précédaient. En gros, les choses revenaient à la normale dans les années qui suivaient. Ce qui différencie les trois crises que nous avons connues ces 20 dernières années, c’est que justement, les choses n’ont jamais été plus pareilles après. La crise provoquée par les attentats du 11 septembre 2001, a lancé les pays occidentaux dans des tensions géopolitiques qui divisent encore aujourd’hui le monde entier. Depuis, nous vivons dans un climat d’insécurité généralisé et nous sommes loin de trouver les solutions nécessaires pour apaiser les choses. Bien au contraire, les relations internationales s’enveniment et une nouvelle carte du monde est en ce moment en train de se dessiner. Sept années passent et la crise de 2008 change littéralement notre centres d’intérêts, notre manière de vivre ainsi que notre manière de consommer. Toutes les innovations dont nous parlions plus haut sont en effet concentrées sur l’émancipation des individus par rapport aux institutions. Ce qui signifie clairement que la crise de 2001 n’a été qu’une simple petite aventure qui a compliqué les choses entre la moitié des années 90 (quand Internet prend son envol) et l’après 2008, quand l’ère numérique commence réellement. On ne peut pas en effet en dire autant de la crise de 2008 qui a provoqué des changements majeurs pour le monde entier, grâce aux innovations parues en 2007. Il faudra néanmoins attendre quelques années (vers 2014) pour en voir des effets conséquents (notamment ceux liés à la Green Revolution).

Venons en enfin à ce qui nous intéresse finalement ici…  Nous venons de vivre, en 2020, une crise de première ampleur qui a mené la moitié des habitants de cette planète à l’isolement pendant un peu moins de deux ans (et tout laisse croire aujourd’hui que ce n’est pas terminé). Les experts en économie nous prédisaient – toujours sur une grille de lecture des schémas catastrophes du passé – qu’une crise économique sans précédent allait arriver. Des faillites à foison, des licenciements en masse, un taux de chômage extrême et une crise de l’immobilier sans précédent. Amusant néanmoins puisque ce que nous vivons aujourd’hui est exactement tout le contraire de ce que l’oracle économique prévoyait. Pas de faillites en masse, des professions qui sont fortement en demande et un marché de l’immobilier qui se porte on ne peut mieux. Voici ce que les confinements successifs nous ont légué. Mais au-delà de cela, nous voyons aussi que les employés des différents secteurs qui ont eu la possibilité de télétravailler y ont pris, eux aussi, un certain goût et beaucoup ne veulent pas d’un retour en arrière.

Tirons donc les leçons de notre histoire numérique récente : 

Une crise économique aujourd’hui, c’est avant tout quelque chose d’autre qu’un simple retour en arrière. Une crise c’est un signal d’alarme qui annonce un changement. Si on observe les révolutions technologiques qui ont lieu maintenant et qu’on les transpose dans ce monde d’après crise, on remarque que les différents mots d’ordres sont la conquête de l’espace, les métavers, les NFT, les bitcoins ou la blockchain et bien entendu les biotechnologies (dont la numérisation des services hospitaliers). Nous assistons aussi à une situation dans laquelle la finance atteint des niveaux on ne peut plus importants. Certaines entreprises technologiques atteignent des capitalisations boursières jamais vues dans l’histoire. Apple et Microsoft ont dépassé la barre des 2.000 milliards de dollars. Tesla vient de passer le cap des 1.000 milliards, et ce n’est pas si mal pour un tout petit constructeur automobile. Les indices boursiers sont largement révélateurs de ce que veulent les populations aujourd’hui. Cette crise que nous venons de passer vient de nous montrer une fois de plus que les grilles de lecture du passé ne sont plus les bonnes aujourd’hui. Le télétravail, la télémédecine et les crypto-monnaies s’installent de plus en plus dans nos vies. Internet nous est indispensable plus que jamais et la conquête spatiale est désormais notre porte de sortie vers une économie florissante et peut être la survie même de l’humanité. 

Retenons donc ce que nous avons à en retenir…

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