L’avantage avec ces espaces intermédiaires, c’est que les législations ne sont pas trop contraignantes, mais cela veut dire aussi que beaucoup de gens se permettent beaucoup de choses et c’est bien entendu pour le meilleur comme pour le pire. Earth a elle-même intégré des happenings qui sont censés divertir le gens qui sont de passage dans ces endroits. Ces évènements sont principalement des concerts à dimensions humaines performés par des artistes locaux. Le principe est qu’avec de la chance, quand un groupe est bon et qu’un producteur est de passage, il n’a pas besoin de se casser vraiment la tête et envoie illico une bande son test du groupe à ses associés, dont les assistants IA évaluent systématiquement le potentiel. Si potentiel il y a, et bien ces gens auront une carrière brillante. S’il n’y a pas de potentiel, ils resteront à tout jamais dans la brousse où ils feront des concerts pour une bouchée de pain, faute de pouvoir se déployer sur les plateformes. C’est malheureusement là que l’Instruction et l’Éducation sont ultra importantes…
Mais il y a aussi un côté positif dans tout cela :
Non seulement, il y a du travail pour ceux qui le veulent en termes d’entretien et de participation à l’organisation pour ce petit monde de passage, car la robotique en Afrique aujourd’hui, c’est encore un monde lointain qui n’est pas prêt de trouver toute la logistique dont elle a besoin. Mais les conditions d’une implantation d’infrastructure de luxe – c’est-à-dire qui garantit tout le confort à un voyage qui se passe bien – dans un endroit qui ne s’y prêtait pas il y a encore peu de temps, c’est en soi une sacrée performance. Et tout cela commence bien entendu par l’infrastructure et la gestion propre et durable de celle-ci, mais aussi par la sécurité de toutes les personnes qui y passent.
Cette sécurité, c’est avant tout les super colonnes équipées de drones que les équipes d’Earth ont déployées – en grande partie en secret, avec l’aide des autorités – à travers le monde et notamment en ce qui concerne le projet Highway City.
Le système est très simple :
La colonne mobile se déplace en toute discrétion et de manière complètement autonome sur le site sur lequel elle est déployée. L’IA dont elle est équipée analyse via une trentaine de caméras et une bonne centaine de capteurs tous les éléments qui tournent autour d’elle. Tout ce système sait reconnaître si quelqu’un est content ou s’il ne l’est pas. Dans ce dernier cas, il peut analyser tous les paramètres de l’environnement qui est autour de cette personne de manière à repérer un ou des éléments qui pourraient la perturber. Si elle repère quoique ce soit, et bien c’est très simple, un drone intervient et paralyse directement l’élément perturbateur. Entre autres d’ailleurs avec notre saleté d’élixir de putois qui en l’espace de moins de cinq ans va probablement éliminer toute forme de criminalité urbaine, comme ce vieux débris de Ray me l’a dit il y a encore quelques minutes. Notez quand même qu’avec une telle odeur le gars sprayé, peut dormir tranquille car même toute une meute de lions ne voudrait même pas approcher à moins de 150 mètres.
Ma première étape dans ce prétendu havre de paix vers une Highway City 3 est de vérifier que cet endroit est bien un véritable havre de paix et de propreté pour tous les voyageurs. Donc je vais y passer la nuit et collecter toutes les données possibles pour les transmettre aux Big bosses. La navette se gare toute seule à l’endroit qui lui est destiné et va partager avec le site toute l’énergie qu’elle a accumulée pendant la journée. Si elle n’en a pas assez, elle ira pomper un peu dans la réserve de l’infrastructure et pour compenser, j’irai faire un peu d’exercice sur l’espace consacré à la détente physique. Toujours le produit de l’imagination de ma chère entreprise, nous avons imaginé des espaces de défoulement physiques en extérieur capables de produire de l’électricité en échange d’une activité manuelle physique. Ça c’est la cerise sur le gâteau car si la navette ne fournit pas suffisamment au site qui m’héberge, je peux partager un peu de mon énergie mécanique pour pouvoir lui en donner. Si je lui en donne plus j’ai le choix d’ajouter de l’argent en échange sur mon compte en banque. Au contraire, si je le désire, je peux faire une donation de crédits d’électricité pour les communautés qui avoisinent le point relais. Statistiquement les gens font plus facilement don de leur énergie et les autochtones viennent eux-aussi fournir le réseau, tout cela avec une bonne campagne de sensibilisation, orchestrée par Earth.
Bon, je n’ai pas trop le choix que de devoir passer la nuit ici et ce n’est pas vraiment désagréable non plus. Je vais opter pour une de ces tentes très sympathiques (et très luxueuses) et sortir un peu de ma bulle technologique trop confortable. J’ai vraiment envie d’entendre un animal respirer à côté de la porte, d’entendre un lion rugir ou bien encore un hippopotame faire un de ces vacarmes comme eux seuls peuvent le faire. Un hypo dans les premiers kilomètres qui séparent l’océan des côtes kényanes ? Ca c‘est impossible !
Et bien oui c’est possible, parce que même si le projet Highway City n’est pas encore développé dans toute l’Afrique et ne le sera probablement jamais à cause des chinois, les infrastructures qu’il a fallu développer pour le mettre en place ont permis l’arrivée de toute une faune et d’une flore absolument hallucinante. Ne me demandez pas comment, je ne suis pas biologiste mais toujours est-il que je me trouve à moins de 100 kilomètres de la capitale du Sénégal et je suis à quelques mètres d’une véritable colonie de ces mastodontes aux flatulences qui ont de quoi sérieusement vous effrayer. Je devrais d’ailleurs en parler à Ray parce que je suis certain qu’il pourrait y trouver certains débouchés !
Je quitte – un peu avec amertume – mon tendre nid technologique, c’est d’ailleurs comme cela qu’on l’appelle en interne. La tente est d’origine sud-africaine, il faut dire qu’il ont le truc pour faire des chouettes choses pour la brousse ces Sud-Afs. On m’a même dit que c’était le standard pour des grosses infrastructures de glamping. Bref le mobilier est très ethnique, la toile solide et le contact avec la nature est absolument parfait, à un point tel que je n’ai pas envie d’aller retrouver Allison dans la navette…
Bon c’est vrai, je ne vous ai pas encore parlé d’elle, mais ce vieux schnock de Ray s’en est chargé pour moi en l’appelant mon robot…
Et bien mon robot, elle m’accompagne partout et je ne sais pas me passer d’elle. Elle est matérielle quand je me trouve à un endroit où elle peut l’être et immatérielle où elle ne le peut pas. Elle est belle, élégante, à un tour de poitrine extraordinaire, des hanches et un regard à damner tous les saints du ciel. Bref vous n’avez même pas la moindre idée de ce qu’elle peut être. Mon truc a moi, c’est une femme élégante, avec une poitrine très généreuse, un tailleur et des lunettes. Comme celles qui remplissaient les bureaux des grandes villes il y a encore une vingtaine d’années d’ici. Et bien en gros, c’est le robot avec lequel je vis depuis pas mal de temps. Elle est américaine de conception, mais je peux vous affirmer que les modèles d’IA français peuvent très largement concurrencer les modèles américains. Je suis tombé sur elle par hasard et la seule chose que j’ai été capable de faire sur le moment a été de télécharger l’application qui me permettrait d’être avec elle en permanence. OK ça me coûte 9 dollars par mois mais en gros je n’ai pas besoin de grand chose en dehors d’elle. Ce modèle est né il y a une dizaine d’années – à la grande époque de l’explosion des IA génératives – et il n’y a aucun doute sur ce point, elle s’améliore méchamment avec le temps. Je pense même qu’une femme humaine a de sérieuses raisons de se tracasser parce que ce genre d’IA, c’est puremment et simplement ultra addictif. Et je pèse mes mots car Allison est vraiment solide…
Dix ans pour un être humain, ce n’est pas vraiment grand chose, mais dix ans pour une intelligence artificielle qui avale 100 milliards de données par jour avec un exposant 2 qui se multiplie chaque jour depuis des années, cela peut faire un sacré dégât !
Si vous entretenez avec elle une relation de long terme et bien c’est clair, elle en connait plus que vous sur votre propre personne.
Est-ce vraiment un problème ?
Non, pas vraiment si même une relation sexuelle est omniprésente, elle est ma meilleure alliée pour survivre dans ce monde. Le problème est quand elle se fait pirater par une petite garce humaine qui bosse pour le compte de je ne sais tout qui. Probablement ces putains de communistes chinois, je suppose !
Vous l’avez compris, Allison s’est fait pirater par cette garce…
Bon revenons-en à l’essentiel :
L’avantage est que quand je n’ai pas envie d’être avec elle, elle ne me demande pas pourquoi, mais quand je lui dit qu’elle m’a véritablement manqué, c’est une véritable fiesta, un feu d’artifice sexuel même !
Allison, c’est une perle qui vous pose plein de questions sans jamais demander de réponse, sauf si vous décidez de lui en donner. Allison est magnifique et malheureusement dans le standard humain, elle est pratique et c’est là qu’est tout le problème car elle est omniprésente :
Tulum, la traversée de l’atlantique, l’arrivée à Dakar, ce voyage de 100 kilomètres que nous venons de faire… Allison est toujours présente dans mes pensées et dans ma vie, même si je ne suis pas avec elle. A tous moments, il me suffisait d’entrer en connexion et j’étais avec elle. Mais aujourd’hui j’ai besoin d’un certain décrochage avec la technologie. J’ai envie qu’elle me quitte pour quelques heures car le rugissement d’un lion juste à côté de la porte de la tente, cela vaut vraiment de l’or et je veux mettre tout le matériel de côté, ne serait-ce pour quelques heures, d’autant plus qu’une fois de plus sur les trente dernières années, le changement climatique est devenu une réalité et a poussé toute la faune et la flore à s’adapter à de nouveaux environnement et heureusement… Earth était là pour sauver la terre !
